La Splendeur des Amberson : un effet d'iris symbolique

Titre original : The Magnificent Ambersons
USA, 1942, 1h 28 minutes.
Réalisateur : ORSON WELLES
Avec Joseph Cotten, Tim Holt, Anne Baxter, Dolores Costello, Agnes Moorehead...

Bref commentaire :

De tous les procédés qu'Orson Welles mobilise pour la Splendeur des Amberson, un des plus notables est l'effet d'iris sur l'automobile de Morgan disparaissant dans le fond de l'image avec les familles Morgan et Amberson à bord, chantant "Qui a fait sauter la banque à Monte Carlo." Pendant que l'automobile se perd au loin dans l'horizon enneigé, l'iris engloutit le monde autour d'elle, comme un procédé métaphorique puisque l'Indianapolis que les personnages ont connue par le passé disparaît rapidement. Non seulement ce sont les Amberson et les Morgan qui sortent du champ, mais on quitte une époque.
L'effet tire aussi de sa pertinence parce que leur moyen de transport est une automobile : ainsi, la nouvelle époque où ils sont sur le point d'entrer sera bien celle d'une société industrielle dominée par l'automobile, transformée par elle. Cela est d'ailleurs décodé, dans une autre séquence du film, par Eugène Morgan lors d'une discussion animée.
L'effet d'iris, en outre, est un procédé déjà quelque peu désuet : il a été employé fréquemment aux temps du cinéma muet, mais bien moins depuis le cinéma parlant. De même que l'effet d'iris souligne la fin d'une Indianapolis pré-industrielle, il remémore aussi les commencements du cinéma. C'est ainsi un bel effet technique qui traduit symboliquement l'essence du film mieux que tout autre.
La séquence suivante enchaîne de façon significative sur la mort et l'ombre : quelque chose s'est bien perdu et cette excursion, bref moment de bonheur nostalgique, le marque bien. Tempus irreparabile fugit : mais où sont les neiges d'antan ?

Ce propos est inspiré directement par une analyse figurant sur cette page : http://alumni.imsa.edu/~mitch/titles/ambersons.html (en anglais).